L’interview GZ : au coeur du salon de l’agriculture, défis de la jeunesse, lourdeurs administratives et menaces pour la souveraineté française
Nous, les GZ de l'Essonne, sommes allés à la rencontre des éleveurs et des agriculteurs, de notre département et de la France, pour le week-end de clôture du Salon International de l'Agriculture. Nous y avons rencontré leurs représentants, au sein des syndicats Jeunes Agriculteurs et Coordination Rurale. Nous leur avons demandé quelles étaient leurs réponses face aux grandes problématiques qui préoccupent les agriculteurs français.
“ Comment pouvons-nous impliquer les jeunes dans le monde agricole ?”, “Quelles sont les raisons du manque de renouvellement des générations ?” , ou encore “Comment l’accord du Mercosur va-t-il les impacter ?”.
Ce sont de telles questions que nous sommes allés leur poser, afin de vous transmettre une parole de terrain.
Enfin, nous vous invitons, à travers cet article, à découvrir un secteur peu connu mais confronté à une grande problématique : l’élevage d’ânes.
La jeunesse face à la crise agricole : des conditions de travail précaires et un avenir incertain.
Attirer des jeunes dans le monde agricole devient de plus en plus difficile en raison des conditions économiques et administratives actuelles. Les revenus des agriculteurs sont souvent faibles et précaires, notamment pour ceux qui ne sont pas membres de grands groupes industriels.
Selon l'Insee, en 2020, le taux de pauvreté dépasse les 20% chez les exploitants de viande bovine, ovine et caprine, ainsi que dans les secteurs du maraîchage et de l'horticulture. Les inégalités entre secteurs sont flagrantes : alors que les viticulteurs perçoivent en moyenne 2 760 euros par mois, les éleveurs de chèvres et de brebis ne gagnent que 680 euros1.
À cela, s'ajoute une charge de travail écrasante : en 2019, les agriculteurs travaillaient en moyenne 55 heures par semaine, toujours selon l’Insee2.
Cette réalité alarmante nous a été exposée par la Coordination Rurale, lors du salon. Le syndicat a souligné les grandes difficultés à impliquer la jeunesse dans ce secteur.
« Qui voudrait travailler 70 heures par semaine pour 1 500 euros alors qu’il peut faire 35 heures pour le même salaire ? », s'alarme le syndicat, qui plaide pour une meilleure valorisation des salaires et des conditions de travail des agriculteurs.
Le syndicat Jeunes Agriculteurs, interrogé sur les difficultés rencontrées par les jeunes pour créer ou reprendre une exploitation nous, ont répondu qu'entre « trouver l'exploitation, obtenir des financements et surmonter les obstacles administratifs », rien ne permet de les aider. Il ajoute également que tout dépend du secteur et de la région d'installation. Leur exemple : en Normandie, la production laitière est dominante alors que dans d'autres régions elle ne l’est pas.
Pourtant, l'agriculture reste un domaine qui peut attirer la jeunesse par son potentiel d'innovation. Les Jeunes Agriculteurs nous affirment que le secteur offre de nombreux débouchés : « Pour un agriculteur, cinq personnes travaillent autour de lui”. Il faut aujourd’hui des comptables, ingénieurs ou encore des juristes pour faire marcher une exploitation.
La transmission des exploitations est une autre problématique majeure pour la jeunesse, le renouvellement des générations et la souveraineté française. D'ici 2030, plus d'un tiers des exploitants agricoles auront atteint l'âge de la retraite, représentant plus de 160 100 personnes. La raison, la Coordination Rurale accuse «des impôts sur les successions trop lourds » et un « manque de repreneurs chez les agriculteurs sans famille ».
Une technocratie lourde face à la crise agricole : les défis administratifs et l'inaction gouvernementale
Parallèlement, les lourdeurs administratives constituent un autre frein majeur pas seulement pour la jeunesse mais pour tout le secteur. Les agriculteurs consacrent une part considérable de leur temps à remplir des documents, à se conformer à des règlements multiples et évolutifs. Selon les témoignages de la Coordination Rurale : les agriculteurs consacrent près de 30 % de leur temps à s’occuper de sujet administratif, ce qui complique leur quotidien et leur rentabilité.
Le manque de simplification des démarches et la multiplicité des interlocuteurs dans le système administratif découragent bon nombre de jeunes souhaitant se lancer dans le secteur. Les Jeunes Agriculteurs nous ont donné l’exemple de la lourdeur administrative sur l’obligation de déclaration des vaches laitières entre 50 et 150, d’enregistrement de 151 à 400 et d’autorisation à plus de 400 vaches.
Les syndicats nous ont exprimé un sentiment d'abandon face à l'inaction du gouvernement. Les Jeunes Agriculteurs expliquent avoir « fait remonter leurs demandes » lors des manifestations, mais affirment n'obtenir que peu de réponses. La seule promesse tenue à ce jour qu’il nous ont transmis est la mise en place d'un « unique contrôle administratif par an ».
De leur côté, les membres de la Coordination Rurale, notamment ceux du Sud-Ouest, pointent d'autres difficultés ignorées par le gouvernement : les attaques de loups et d'ours, la fièvre catarrhale ovine (FCO), les problèmes d'irrigation, la sécheresse chez les viticulteurs ou encore les ravages du mildiou.
Une compétition internationale qui met en péril la souveraineté agricole : inégalités de normes et menaces pour les exploitants français.
L'accord du Mercosur est un autre sujet d'inquiétude. Les Jeunes Agriculteurs nous alertent sur des produits importés à « coûts trop bas », rendant toute compétition inéquitable. Ils dénoncent aussi les « normes inégales » entre les produits français, les produits des pays de l’est et ceux extérieurs à l’Union européenne, qui pourraient “asphyxier les agriculteurs” français.
Les normes sont aussi un enjeu crucial dans la compétition de nos produits locaux. La Coordination Rurale dénonce celles concernant « les produits phyto, les traitements, la traçabilité et l'hygiène », qui pèsent sur les exploitants français alors que d'autres pays concurrents ne sont pas soumis aux mêmes exigences et “créent un fossé”. Plus que de réduire les normes,nos agriculteurs demandent à être sur un pied d'égalité avec leurs homologues étrangers.
Les membres du syndicat de la Coordination Rurale nous ont résumé la tragédie agricole en une phrase :
« On veut vivre de notre passion et non survivre. »
Les Ânes, un élevage menacé !
Les ânes, fidèles compagnons de l’homme depuis des milliers d’années, sont aujourd’hui en voie d’extinction sous le regard aveugle du gouvernement et des médias. En 2010, en France, on ne comptait plus qu'environ 78 000 ânes selon l'Institut Institut national ânes et mulets (INAM) et 31 500 ânes selon le recensement agricole. Au salon de l'agriculture, nous avons rencontré des éleveurs de l’âne bourbonnais, reconnu en 2002 par le ministère de l’Agriculture, nous expliquant qu’ils ne voient naître que quelques dizaines de spécimens par an.
Selon ces éleveurs avec lesquels nous avons parlé, cette race est mise en danger par l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE), qui rabaisse la filière de l’élevage des ânes en la qualifiant de “sous-segment” et “empêche la structuration” des éleveurs “depuis deux ans”. De plus, l'institut ne permet aucun élevages à but de consommation et donc empêche un développement de la filière.
Enfin, les éleveurs nous ont fait part de l’abandon de la filière par le gouvernement en ne fournissant aucune aide à la reproduction ou à l’élevage des ânes et laissant donc un secteur mourir devant les yeux des français.
L'équipe Génération Z Essonne
Génération Z Essonne